Comme ça s'écrit…


Comment ne pas être dominé

Posted in Réflexitude par Laurent Gidon sur 31 Mai, 2022
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Anaïs Vaugelade / L’École des Loisirs

La domination est systémique, selon le credo victimaire.

À moins d’être un homme, blanc, hétéro, si possible de plus de cinquante ans (mon cas, si vous souhaitez m’injurier), vous êtes forcément victime d’un système de domination, voire d’oppression.
Ce fait vaut-il invitation à rejoindre le chœur des râleurs ?
Encore vous faudrait-il trouver un groupe victimiste dont vous partageriez toutes (TOUTES!) les positions, aussi bien morales que politiques ou identitaires. Sinon, vous aurez le choix entre faire taire vos convictions (et donc être victime de votre propre groupe de défense) ou les exprimer et vous trouver immédiatement rejeté par le dernier bastion censé partager votre combat (« Tu ne PEUX pas penser ça si tu es de notre côté ! »).

Parmi vous se trouvent forcément des victimes de quelque oppression. Pour ne pas se retrouver, soit rejetée, soit de nouveau oppressée par le groupe de défense ad hoc, la solution me semble être de ne se reconnaître dans aucune catégorie. C’est l’appartenance qui fait l’oppression, comme c’est la dose qui fait le poison.

Bien sûr, vous ne pourrez pas vous absoudre de toute appartenance dans le regard de l’oppresseur. Lui saura bien vous rappeler de quel groupe vous dépendez (pauvre, femme, immigré, gauchiste, assisté, Russe, réactionnaire, pervers…) et vous opprimer en conséquence, non pour ce que vous êtes, mais pour ce qu’il reproche ou attend de la catégorie à laquelle il vous rattache (vous noterez qu’en bon langage inclusif l’oppresseur est toujours masculin).

C’est là qu’intervient votre liberté d’être.
Face à l’oppression, n’appartenir à rien ni personne d’autre qu’à soi-même.
Ne pas appartenir à un territoire ou une nation – ici c’est chez moi –, ne pas appartenir à une idéologie ou une religion – je me bats pour ce que je crois – et ne pas appartenir à ses possessions – je défends ce qui est à moi – conditionne, il me semble, la liberté d’être soi.
Ne se réclamer d’aucun genre, race ou mouvement, et ne revendiquer que son droit à disposer de soi-même.

Et le collectif, me direz-vous, l’union qui fait la force, le combat juste mené pour ceux qui ne peuvent le mener eux-mêmes ?
À cette légitime question je répondrai : allez-y, rejoignez le collectif de votre choix, engagez le combat, puisque vous disposez de vous-même, mais ne cédez jamais votre loyauté à quiconque.
L’engagement pour de bonnes raisons n’a de valeur ou d’intérêt que dans la liberté de se dégager.
Les raisons changent, l’engagement évolue, les combats se dévoient, la liberté individuelle demeure.

Chacun se doit d’abord à soi.
Rien d’égoïste là-dedans, juste une charité bien ordonnée.

Quoi qu’il arrive, la mort est au bout.
Chacun dispose de l’entière liberté de vivre bien ou mal le temps qui l’en sépare.

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Faisant usage de ma liberté individuelle j’ai commencé et immédiatement abandonné A Dos d’oiseaux pour retrouver Sylvain Tesson et son Petit Traité sur l’immensité du monde