Comme ça s'écrit…


Quelques plans

Posted in Réflexitude par Laurent Gidon sur 19 novembre, 2015


Quelques plans d’un téléfilm de Christian Faure (Paradis Amers).
Plan serré sur un crucifix de fer forgé et de tôle, vu de trois-quarts face.
Le film nous l’a montré quelques minutes avant, il s’agit d’un calvaire au bord d’un chemin de campagne.
Des cailloux viennent faire résonner une couronne de tôle à l’intersection des deux branches de la croix.
Un grand-père nous a appris que son petit-fils avait pour habitude, gamin, de jeter ainsi des pierres pour faire sonner la couronne. Le grand-père vient de mourir et le petit-fils aujourd’hui ado a fui l’enterrement.
Pendant que les cailloux continuent de pleuvoir, la caméra entame un mouvement tournant qui cadre la croix de dos et le jeune homme pris en légère plongée.
La croix du calvaire est à plusieurs mètres de hauteur, il s’agit donc d’un plan à la grue, préparé et budgeté (nous sommes dans un téléfilm en coproduction publique) et non d’une idée de dernière minute sur le tournage.
Plan resserré sur le jeune homme a l’air buté, toujours en légère plongée, comme vu par les yeux de la croix.
Changement d’axe à 180°, plan large sur le jeune homme de dos. Le cadrage permet de voir devant lui sur sa gauche le calvaire entouré de buissons et de ronces, et sur sa droite un chemin herbeux, creusé de deux ornières blanches, qui s’élève et disparaît derrière une butte d’herbe sur fond de ciel bleu.
Les quelques secondes de cette séquence semblent concentrer tous les effets grammaticaux du film.
Pourquoi ces plans ?
Comment les interpréter (non pas leur sens, assez limpide, mais leur place – et leur prix – dans un film qui traite d’un tout autre sujet) ?
Au moment où je m’interroge sur le cercle vicieux qui relie fondamentalisme marchand et fondamentalisme religieux dans la situation géopolitique conduisant aux attentats de l’avion russe, de Beyrouth et de Paris, cette injection de religion là où on ne l’attendrait pas me pose problème.
Le cinéaste possède parfaitement sa technique et sa syntaxe cinématographique. La séquence est parfaite. Mais que dit-elle, au fond ?

Si Christian Faure passe ici, son avis me sera précieux (en plus il comprendra que j’ai apprécié son film)

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Je viens d’achever la lecture du Complexe d’Eden Bellwether dans lequel Benjamin Wood nous démontre in fine que tout espoir est une folie à soigner. Drôle d’idée.

Je suis le monde et vous ne m’aurez pas

Posted in Non classé par Laurent Gidon sur 15 novembre, 2015
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Paris

Quand vous êtes venus avec vos fusils je n’avais pas d’armes
et demain je n’en aurai toujours pas
vous ne m’aurez pas
Quand vous avez craché votre haine je ne vous haïssais pas
et aujourd’hui encore je ne vous hais pas
vous ne m’aurez pas
Quand vous infligez la douleur j’ai mal
mais cette douleur ne me changera pas
vous ne m’aurez pas
Vous vouliez nous faire peur et j’ai eu peur
mais cette peur ne m’arrêtera pas
vous ne m’aurez pas
Vous qui voilez la femme, le rire, la musique et la fête,
dès que j’aurai pansé ma peine
je fêterai le rire, la musique et l’amour dévoilé
vous ne m’aurez pas
Et vous qui appelez à la vengeance impitoyable
je ne me vengerai pas et j’aurai toujours pardon
vous ne m’aurez pas non plus
Quand les ailes d’anges se brisent
Je déploie celles du cœur à travers mots
Car il y a place en moi et lumière pour tous
Je suis le monde et vous ne m’aurez pas