Comme ça s'écrit…


Canne ou lard ?

Posted in Non classé par Laurent Gidon sur 31 mars, 2017

Vendredi 1er avril, ne vous découvrez pas d’une écaille !

Les « Malgré Tout »

Posted in Réflexitude,Vittérature par Laurent Gidon sur 28 mars, 2017

Dans la presse, sur Internet et peut-être même dans les meetings, la campagne fait mollement rage.
Est-ce le brassage quotidien des programmes et des révélations qui éteint l’enthousiasme aussi fort que l’indignation ? On se laisse porter.  On attend l’isoloir sans plus y croire. Malgré soi et ses rêves.
Il y a eu les « malgré nous » incorporés de force dans l’armée allemande. Sommes-nous les « malgré tout » de ce temps qui nous incorpore à une bêtise d’une tout autre échelle ? Le monde, rien de moins. Et l’avenir tout entier.

En ouvrant les volets ce matin-là j’ai frissonné de plaisir à l’inspiration du premier bol d’air. Jour de printemps, radieux.
Les saisons se foutent de nos avanies électorales. La nature au réveil devrait nous rappeler le peu d’importance de nos emportements circonstanciels.
Les jonquilles redressent la tête sans souci des dégâts que nous infligeons au climat. Ou peut-être s’en soucient-elles mais, malgré tout…
Ce malgré tout qui nous fait nous lever, nous fera sortir voter, nous fera croiser nos voisins humains quel que soit le résultat des urnes, lequel de toute façon tombera à côté.
Malgré tout les volets s’ouvriront et l’air vif ravira mes poumons.
Nous passerons ; quelque chose continuera. Malgré nous.
Et pourtant, nous pourrions.

Il faudrait sortir de la sidération et des idées imposées.
Quelle idée, d’ailleurs, que de vouloir « faire barrage » au Front National !
Un parti s’appelant Front est déjà un barrage à lui tout seul.
Un front contre ce qui est autre, contre ce qui complète ou interroge, contre ce qui est facile à désigner comme ennemi.
Un front contre les questions, contre les nuances, contre l’évolution.
Un Front sidérateur, coup de boule contre la pensée personnelle qui pourrait se déployer derrière l’os convexe de chacun.
Au lieu d’ouvrir de vraies pistes de solution, nos autres candidats réclament notre vote utile et se réclament de barrer la route à une barrière.
Faire barrage au Front : pléonasme politique ! L’inutilité à plein mots, l’inaction batailleuse. Front contre Front.

Face à ce bégaiement du barrage je ne vois que le bief comme alternative. Un canal de dérivation qui relâche la pression en proposant une voie de sortie. Une soupape à idées.
En cessant de fixer l’épouvantail à pensée, nous pourrions nous poser avec justesse sur le monde comme dans nos vies.
Sortir de ce qui nous peine, de l’économie piège, du combat permanent, du confort écrasant, des saloperies cachées.
Oser des évolutions qui ne ménageraient pas la chèvre et le chou mais donneraient un cap enviable.
Oser la proposition d’écoute et de rapprochement au lieu de s’insoumettre à un sempiternel combat.
Pas de facilité immédiate, non, mais au moins de quoi participer, au lieu d’envier ou haïr.
Parier sur la bonne volonté, même chez ceux qui profitent à outrance : ils y viendront.
Réveiller les vrais besoins et savoir pourquoi on se lève, on se parle, on se déplace, on produit. Avoir enfin une bonne raison de se reposer, un vrai pourquoi.

Pourquoi ? Aïe, aïe, aïe ! Oui, oser la question du sens, mais pas seulement la nuit, pas seulement debout.
Et écouter les réponses, toutes les réponses, les faire jouer ensemble : jamais il n’y a de solution unique. Ne pas chercher le consensus, mais l’interculturalité.
Retrouver une culture que l’on pratique au lieu d’en promouvoir le spectacle béant.
On saurait pourquoi on se lève : pour chanter ensemble, jouer ensemble, écrire ensemble, cuisiner ensemble, et bien sûr pour apprendre les gestes et les sensations, apprendre à faire à plusieurs sans pour autant cesser d’être soi. Être un peu fiers enfin de ce que l’on fait plus que de ce que l’on croit.

Et cela ne coûterait pas tant. Juste du temps, et il y en a.
Malgré tout, malgré la course, la compétition, les menaces, les convoitises, les ambitions, les faiblesses, les jalousies, malgré tout nous pourrions. Erreur : nous pouvons !
Mais pas malgré nous : cette responsabilité est la nôtre. Même les urnes ne peuvent nous en dépouiller.
Malgré tout, il faudra bien assumer notre responsabilité et relever la tête.
Les jonquilles y arrivent, pourquoi pas nous ?

Jeudi 3 à la seconde près

Posted in Non classé par Laurent Gidon sur 27 mars, 2017


Une inscrite à l’atelier d’écriture du jeudi vient me voir pour m’expliquer qu’elle a préféré ne pas participer cette fois-ci car un cours déplacé l’empêchait de rester plus de trois quarts d’heure, « et trois quarts d’heure ce n’est pas assez pour en profiter ».
Elle aime écrire. Elle m’a imprimé un de ses textes pour que je lui donne mon avis. Elle n’a pas peur du regard des autres et sait décider en fonction de ce qui lui semble le mieux pour elle. Là, elle estimait n’avoir pas le temps d’en profiter.
Le temps me semble être une notion étrange : chacun s’en fait son idée propre et pêche à le définir efficacement comme à en faire bon usage. Le temps nous échappe lorsque nous tentons d’y réfléchir. Et encore plus lorsque nous n’y pensons pas.
Après chaque seconde une autre seconde se présente, nous en faisons ce que nous voulons, et pourtant nous sommes nombreux à estimer en manquer.
Un rapide calcul attribue quatre-vingt six mille quatre cents secondes à chaque journée.
Un autre m’en a fait consommer un milliard six cent quinze million six cent quatre-vingt mille depuis ma naissance, à quelques journées bissextiles près.
J’ai beau chercher, au moins du point de vue de mes cellules – de leur croissance comme de leur remplacement -, je n’en ai pas perdu une seule : toutes ont servi. Pourtant, il m’arrive de croire perdre mon temps. Mon cerveau me trompe sur cet usage que j’en ai. Nos perceptions nous trompent tous.
Deux mille sept cents secondes, ce n’était pas si mal pour partager quelques plaisirs de plume.
Alors, à jeudi prochain, soit dans six cent quatre mille huit cents autres secondes. Et quelques flocons.

Je ne compte pas les secondes quand je lis A Moi seul bien des personnages, de John Irving.

Dix jeudi je dis deux

Posted in Vittérature par Laurent Gidon sur 22 mars, 2017

L’animateur d’atelier d’écriture est un peu comme le professeur en collège ou lycée : il prépare soigneusement ses interventions pour ne pas se trouver démuni face au groupe.
Là où la comparaison s’arrête, c’est lorsque l’animateur s’aperçoit que toute cette préparation n’a qu’un but, bien éloigné de celui d’un professeur : laisser faire aux jeunes ce qu’ils veulent.
Les aider, même. Leur donner les outils de cette liberté.
Voilà à quoi je me suis préparé, jeudi dernier. Je crois – j’espère – que cela a marché.
Parce que être libre c’est le contraire d’être bloqué dans un schéma, même très personnel.
Être libre c’est le contraire de ne pas pouvoir marcher parce qu’on n’a pas appris à se tenir debout et avancer un pied puis l’autre.
Être libre c’est le contraire de gratter une corde de guitare sans rien en tirer d’autre que toujours la même note. C’est savoir jouer de l’instrument pour interpréter la partition qu’on se choisit ou improviser sans contraintes, surtout techniques.
Être libre, cela s’apprend. Et un groupe qui apprend sa liberté, c’est beau à voir.

Il faisait beau aussi sur la route de Faverges. Pour faire la photo j’ai trouvé une nouvelle façon de ma garer, plus pratique. Le soleil câlinait les montagnes. J’ai failli changer de cadrage pour y faire entrer quelques sommets enneigés.
Mais non, Auggie veille.
Sur le retour, j’ai pris deux auto-stoppeurs à la sortie de Saint-Jorioz. Tentative de conversation :
— Vous venez d’où ?
— Ben… Saint-Jorioz.
Silence.
— Non, mais avant : travail ? Lycée ?
— Lycée.
Silence
— Lequel ?
— Pfff… Lafontaine.
— Ah, mais j’en viens, justement. J’ai animé un atelier d’écriture là-bas. Vous saviez qu’il y a un atelier d’écriture tous les jeudis à Lafontaine ?
Silence.
— Pfff… ouais.
— Et ça ne vous dit pas de participer ?
Silence.
— Vous pouvez nous poser, là ? Merci, au revoir.
La liberté, ça s’apprend.

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En attendant jeudi prochain, je lis Sur les Chemins noirs, de Sylvain Tesson.