Comme ça s'écrit…


Espoirs de vie

Posted in Réflexitude par Laurent Gidon sur 12 décembre, 2011

J’ai entendu cela sur France Culture ce matin : pour la première fois depuis plus de cinquante ans, l’espérance de vie a reculé en Allemagne. Deux ans de moins en moyenne, 4 pour ceux de l’ex-Allemagne de l’Est. Je n’ai pas encore trouvé confirmation, mais c’est une journaliste allemande qui le dit. Je la crois.
L’idéal allemand de bonne gestion économique, de performance technico-commerciale et de consensus socio-politique accouche d’une réduction de la vie. Beau résultat.
Tout de suite je me demande si les Grecs vivent plus longtemps, par solidarité. Et dans la même seconde, je me dis qu’il y a là un espoir.
Enfin, les chiffres font mentir les chiffres.
Enfin, on voit que la vie productive, économiquement croissante et socialement rigoriste, si belle sur les graphiques comparatifs, ne vaut pas d’être vécue. D’eux-mêmes les Allemands qui sont à la pointe européenne du système se retirent du jeu. Ils nous montrent qu’être plus performant, que produire plus, mieux et moins cher, que réussir à convaincre le reste du monde du caractère hautement désirable de ces produits comme du mode d’organisation qui les a produits, que toute cette démarche de vainqueur de la guerre économique… vous met un pied dans la tombe. Et qu’il vaut mieux trouver autre chose. Ou crever. On s’en doutait un peu, remarquez, mais là, ce sont les statistiques qui parlent.

« Mais, mais, mais… clameront les apeurés, mais tu veux donc qu’on revienne au moyen âge des cavernes, éclairés à la bougie avec des racines bouillies pour toute pitance, hein, c’est ça que tu veux ? »
Si c’est cela qui vous fait peur, il a de fortes chances que vous l’obteniez.
Mais nous pouvons, au contraire, considérer ce signal fort pour ce qu’il est – une incitation à repenser pour chacun les objectifs profonds de sa vie – et peut-être pourrons-nous partager un espoir.
Je n’ai ni leçon à donner ni solution toute faite, juste cet espoir qu’un jour nous passions plus de temps et d’intelligence à nous occuper les uns des autres plutôt qu’à être plus performants ou rentables que l’entreprise ou le pays d’à côté. Je ne sais pas si cela me rallongera la vie, mais ça me la rendra plus agréable.

And then they were dead

Notes de l’art

Posted in Admiration par Laurent Gidon sur 5 décembre, 2011

Il m’est arrivé parfois de dire que j’écris en me chantant les phrases dans la tête, comme si c’était de la musique, comme si j’écrivais des notes sans paroles. Et ce matin, je tombe sur ce superbe petit film présenté par Télérama sur son site. Un artiste parle de sa façon de chercher les notes, d’utiliser son outil comme un violon, de se laisser aller à l’improvisation sur un thème.
Edmond Baudoin improvise « Le Cheval » par telerama
Et si tout art était d’abord de la musique ?
Et si la musique était l’art premier, celui qui exprime ce qu’on a dans le cœur sans qu’aucun filtre ne vienne perturber le message ? La musique propulse l’émotion en direct. Pas besoin de paroles, ni de forme, ni de couleur. Elle nous fait rire ou pleurer même si nous ne comprenons pas pourquoi.
Alors je me demande si tous les artistes ne seraient pas des musiciens qui s’ignorent. Ou qui, au contraire, savent bien ce que la musique a de primordial dans leur art. Dans leurs traits, leurs mots, leurs gestes, ils cherchent la note juste. Sous la technique ou la matière qui leur est propre, ils nous chantent quelque chose en profondeur.
Et ceux qui affirment se contenter de faire du beau ou de raconter des histoires se leurrent peut-être : en ignorant la musique primale qui court sous leur babil, ils lui laissent prendre une force incontrôlée.

Photo du site de Télérama (à qui les droits ?)