Comme ça s'écrit…


De quoi on se souviendra

Posted in Vittérature par Laurent Gidon sur 30 mars, 2020

On se rappellera que les oiseaux chantaient, que la terre était calme, que beaucoup d’humains rongeaient leur colère et que le ciel avait perdu ses bandes blanches.

On se rappellera que tout le monde ne parlait que de ça, que chacun avait son avis et s’empressait de le donner, et que ça ne changeait rien au cri des armes, aux morts en Syrie, aux esclaves migrateurs en Libye, aux conditions de survie dans les camps de migrants, aux tractations internationales et aux déstabilisations numériques.

On se rappellera que tout à coup il fallait s’occuper des enfants, faire à manger, remplir le temps, s’occuper de soi, se poser des questions, ne pas avoir de réponses, se demander ce que la vie deviendrait et même s’il adviendrait autre chose que le confinement.

On se rappellera que des gens pleuraient, que d’autres s’épuisaient, que les lits manquaient mais pas les canapés.

On se rappellera des questions bêtes qu’on se posait, pour savoir si on avait le droit de faire ci ou de sortir comme ça, parce qu’on nous avait fait croire à une punition généralisée, pour nous pauvres petits guignols, avec coups de bâton du gendarme, au lieu d’éveiller nos consciences à ce qui était vraiment utile et nécessaire.

On se rappellera que quelques mois avant le gouvernement proposait une réforme des retraites ouvrant la voie à plus de capitalisation, et que tout d’un coup la capitalisation est devenue un champ de ruine, qu’il a fallu sauver les bourses, l’économie, les flux d’argent, tout en prônant la solidarité et la santé gratuite.

On se rappellera que le pouvoir en place maîtrisait autant le grand écart moral que l’hypnose militaire, oh oui, ça on s’en souviendra !

On se rappellera que le meilleur mot pour évoquer cette économie en deuil était nécrolibéralisme.

On se rappellera que les frontières existaient toujours, mais que le virus n’avait pas été prévenu.

On se rappellera que le gouvernement changeait les lois en urgence et on verra bien ce qu’on en fait plus tard, combien de temps ça dure, et tant pis si c’est un gouvernement d’extrême-tuc qui en hérite.

On se rappellera que des écrivains écrivaient des banalités journalières et que d’autres, parfois les mêmes, réussissaient à nous toucher d’un mot, que des artistes faisaient du home-art en ligne, que des grimpeurs en manque escaladaient leur cuisinière ou des chambranles de portes, que des chaînes devenaient gratuites mais que le CSA nous en libérait très vite pour cause de respect de la sainte concurrence.

On se rappellera que des politiciens et des people mouraient comme les autres, et qu’on avait eu un peu honte de nos compassions à géométrie variable.

On se rappellera que le respect des règles était plus important que la règle elle-même, que la police verbalisait ou embastillait pour un petit papier mal rédigé, que les bons citoyens dénonçaient les mauvaises pratiques de leurs voisins, que des pétitions exigeaient l’expulsion des soignants ou des homosexuels notoirement trop contaminants, que la peur n’avait plus de camp à force de ne pouvoir en changer.

On se rappellera que le retour à la normale sonnait à nos oreilles comme le retour à l’anormal, et qu’on n’en voulait pas vraiment sans trop savoir quoi mettre à la place.

On se rappellera que tant de choses n’étaient pas si indispensables dans notre vie d’avant, et puis on oubliera.

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On se rappellera aussi qu’il y avait un podcast qui parlait de dépression en mode léger parce qu’on peut rire de tout à commencer par soi.

Et l’épisode 5 :

J’aurais su, j’aurais rien dit !

Posted in Textes par Laurent Gidon sur 27 mars, 2020
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Quoi de mieux pour s’égayer le confinement qu’un podcast sur la dépression ?
Vous êtes d’accord ? J’en étais sûr !

Blague à part (!), cette série de dialogues écrite pour France Culture (et qui n’a jamais vu le jour) parle de dépression en mode léger, parce qu’il n’y a rien de mieux que la parole pour s’alléger le bourdon sans rien édulcorer.

C’est fait avec les moyens du bord : j’interprète tous les personnages sans trucage ni bruitage. Du podcast low tech…
Je prévois une dizaine d’épisodes, chacun entre 5 et 8 minutes, de quoi offrir une petite bulle à ceux qui ne participent pas à mes ateliers d’écriture dé-confinés.

Le premier épisode :

Et bien sûr il y a toujours les propositions de lecture numérique gratuite : Persistance, par exemple, dialogue post-mortem avec mon père, écrit dans la foulée de L’Abri des Regards. Y a qu’à demander.

Idiots ou salauds ?

Posted in Réflexitude par Laurent Gidon sur 23 mars, 2020
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La propagation du virus donne voix à toutes les colères contre le pouvoir.
Ceux qui nous gouvernent savaient et n’ont rien préparé : ce sont des salauds, en plus ils nous mentent.
Ou alors ils n’ont pas su voir, puis se sont trompés, et ce sont des idiots.
Il va donc y avoir une «remise en cause très profonde de l’autorité» selon Jacques Attali, qui nous assure, plein d’espoir et je l’en remercie, que «le pouvoir politique appartiendra à ceux qui sauront démontrer le plus d’empathie pour les autres».

Tant mieux ! Mais je ne vois pas là un problème d’idiots ou de salauds, ni même d’empathie.
Non, le problème c’est le pouvoir : cette fiction à laquelle nous déléguons une bonne partie de ce qui nous incombe.
Pour reprendre les mots de Jacques Attali, il revient à chacun de «faire le meilleur usage de son temps sur cette planète», et en premier lieu de remettre effectivement en cause l’autorité. Mais pas pour la remplacer par une autre, plus juste ou plus humaine.

Avons-nous vraiment besoin d’un pouvoir intelligent et juste (donc ni idiot ni salaud) pour nous dire ce qui est bien ou mal, bon ou mauvais ?
N’avons-nous pas tous les moyens, aujourd’hui comme hier, de mesurer l’impact de chaque geste ?
Est-il suffisant qu’une autorité nous y autorise pour nous vautrer dans le confort, épuiser ce qui peut l’être et polluer tout le reste par notre mode de vie inconséquent ?
L’État est une fiction, la nation est une fiction, l’argent est une fiction, la société et la position de chacun dans cette société sont des fictions, et nous laissons ces fictions régler notre réel uniquement parce que nous y croyons très fort.
C’est confortable d’y croire. Cela crée un tampon de pouvoir entre le réel et chacun de nous. Croire au pouvoir nous décharge de notre responsabilité personnelle.

L’épidémie n’est pas un cadeau. Pourtant, elle nous offre l’occasion de revoir ces croyances, reprendre la main et nous intéresser vraiment à la portée de ce que nous faisons à chaque instant.
Reprendre le pouvoir, ce n’est pas tout s’autoriser. C’est être conscient de chaque acte, voire de chaque pensée, et limiter l’influence des peurs et croyances sur notre perception du réel.
Un virus inhalé ou un placard vide ont plus de pouvoir sur le réel qu’un président ou un décret.
Face au réel nous ne sommes pas seuls – la solidarité n’est pas une croyance, mais une action – et il nous revient de ne pas nous en isoler par la délégation à un pouvoir tampon.

La Boétie nous avait prévenus : ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. Aujourd’hui on ajoutera : ils ne sont puissants que parce que nous croyons en notre propre impuissance.
Il est encore temps de nous relever, et surtout de cesser cette logique sacrificielle qui nous conduit à accuser le pouvoir de tout ce que nous ne voulons pas assumer.

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Pour m’accompagner dans cette nécessaire reprise d’autorité sur moi-même, je lis Vaincre ses peurs et La voie des guerriers du rocher, tous deux aux éditions du Mont-Blanc – Catherine Destivelle (dont je vous reparlerai bientôt si le virus ne nous croque pas)

Quant à ceux qui voudraient profiter du confinement pour lire un de mes romans, y a qu’à demander.

No Journal

Posted in Textes par Laurent Gidon sur 21 mars, 2020

Alors que les écrivains à la mode inondent les médias de leur « journal de confinement » respectif, ne comptez pas sur moi pour en rajouter ici.

J’ai d’ailleurs un peu honte de l’avoir fait, brièvement, voici déjà 15 jours. Heureusement, les stats de visites se sont effondrées, personne ne m’a lu.

En revanche, si je peux aider à passer le temps par quelques lectures plus difficilement accessibles, là, OK.

À ceux qui s’ennuient je propose donc de lire numériquement et gratuitement, chez vous, les romans que j’ai écrits et dont j’ai les droits.
Pour recevoir votre fichier (précisez pdf ou ePub) il suffit de le demander par un commentaire ci-dessous (en laissant une adresse mail valide, bien sûr).

Vous pouvez commencer par Aria des Brumes, mon tout premier roman publié dont la version redux est ici (clic) sous forme de blog.
Allez-y juste pour voir si ça vous intéresse, avant de me demander le fichier complet pour lire plus facilement. Il s’agit de science-fiction, typée planet opera, mais sans trucs compliqués.

Je vous propose aussi la suite d’Aria : Terra Concerto, qui élargit l’action à l’ensemble de l’aire Terraform (inédit, disponible uniquement en fichier).

Et pour les amateurs de polar bien noir : Papa va mal, un roman bref et sec au parti-pris narratif radical (aucune description, rien que du dialogue ou du monologue intérieur.

Voilà, ce n’est qu’un début. L’occasion pour vous de tester des lectures dont vous ne savez rien.
C’est d’ailleurs ce que je fais toujours en bibliothèque : choisir un livre sur son seul titre ou son auteur, sans jamais regarder la quatrième de couverture.

Avant le confinement, j’avais pioché au hasard Péplum d’Amélie Nothomb, et L’Amérique m’inquiète de Jean-Paul Dubois. Deux bonnes surprises.

Et cadeau, pour passer des heures à le chercher, la version « confinement et distances de sécurité » de Où est Charlie :

CoronaJournal

Posted in Vittérature par Laurent Gidon sur 1 mars, 2020
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Petit ressenti quotidien, puisque me voici aux avants-postes de la contamination et donc de la résistance passive au Covid-19.

Dimanche 8 mars – dernier jour

Désolé, mais il me semble indécent de continuer de papoter virus vu ce qui se passe un peu partout, notamment le sort des refoulés à la frontière grecque ou le traitement policier de la manifestation des femmes hier soir.
Le stade 3 de l’épidémie sera-t-il l’occasion d’un nouveau maintien de l’ordre républicain à coup de matraques et de gaz, voire de tir à balles réelles ? Pour maintenir les colères en quarantaine ils vont sans doute s’en donner à cœur joie… toujours en suivant strictement les ordres, bien sûr.
Alors voilà, c’est fini, on parle d’autre chose. Portez-vous tous bien, lavez-vous les mains et toussez dans votre coude, sans oublier que la vraie vie et les vrais combats sont ailleurs.

Samedi 7 mars

Le virus ayant atteint l’Assemblée Nationale, l’Italie tapant les deux cents morts (voire plus), que pouvons-nous faire depuis notre petit village confiné ?
La réponse est dans la photo :

Coronaski

On a tenté la blague de crier dans la benne « on est de la Balme ! » avant de tousser très fort (pour de faux, rassurez-vous).
Tout le monde s’en fout : la benne monte à la combe de Balme, alors…
Un qui ne s’en foutait pas, c’est le jeune homme croisé au retour en voiture : seul au volant, il portait un masque.
L’humanité m’épatera toujours.
Il n’y a plus qu’à faire reposer les cuisses en attendant dimanche (quatorzième jour depuis ma rencontre avec le Maire du village et probable transmission par longue poignée de main) pour voir si le virus a supporté les changements d’altitude à mach 12 dans une poudreuse déjà bien ravagée (hé, les skieurs du vendredi, vous ne saviez pas qu’il ne fallait pas sortir ?)
Quant aux visiteurs du blog, le plus courageux venait hier des Philippines : bravo Philippe !

 

Vendredi 6 mars

Alors ça y est, on parle de passer en phase 3 de l’épidémie. On prévoit un afflux de malades, le système de santé s’organise, le pays tout entier va faire face. Notre cher Dauphiné garde sa page « direct » à jour (allez-y, faites-vous peur, c’est là-bas qu’on s’informe et pas sur ce blog).
Le village perdra bientôt son statut envié de cluster, et c’est très bien.
Ici, autant dire que rien ne change.
Certes, les habitants sont toujours incités à rester chez eux, tout rassemblement est interdit, les commerces tirent la langue… D’ailleurs, dans le cadre d’un plan de relance local nous abusons des bonnes choses en achetant tous les jours et plus que de coutume chez nos fournisseurs bien aimés. A nous tartes aux pralines, bleu de Bonneval et quiches poulet-estragon…  Si je pouvais, j’irais me faire couper les cheveux plus souvent.
Je constate aussi que les chantiers continuent sans précaution particulière, que ce soit pour installer un nouveau transfo, terrasser un futur emplacement d’immeuble ou refaire les réseaux d’adduction d’eau. Le village est perforé de toutes parts, le virus n’attaque pas les travailleurs venus d’ailleurs.
En revanche on apprend qu’il peut se transmettre par les livres, et donc à la bibliothèque (qui est fermée ici, mais chez vous : gaffe !).
Quant aux statistiques du blog, elles surexplosent, avec des lecteurs venus du Salvador, de Corée du Sud, du Costa Rica ou de Grèce… Passé mille par jour, je ne compte plus.
D’autant que ça ne veut rien dire.
La quantité de commentaires enregistrés ci-dessous (0 à l’heure où je poste) montre bien ce que les visiteurs cherchent ici : rien, sinon un petit frisson de curiosité vite étouffé sur l’air du « rien de sanglant ».
Il faudrait que je balance quelques grosses révélations bien saignantes, mais pas ce soir, j’ai pizza (oui, le plan de relance local passe par le soutien à nos deux pizzaïolos, merci eux). Et vous autres, portez-vous bien !

Jeudi 5 mars

Alors que même James Bond est repoussé par le virus, je me demande sincèrement – c’est-à-dire que je n’ai pas la réponse – si ce coronajournal est bien salutaire.
Il a suffi du petit post d’une amie sur fb pour que les statistiques de ce blog explosent. Et quand je parle d’explosion : les visites se sont multipliées d’un facteur cent (à ce jour, mais ça monte encore). Mon audience s’étend aussi géographiquement, avec des lecteurs venant de France, certes, mais aussi de Suisse, d’Espagne, des USA, des Émirats Arabes Unis, du Cambodge, du Sénégal, du Portugal, du Sultanat d’Oman, et d’Italie (un seul Italien malgré la proximité immédiate, le virus comme la connexion ayant sans doute du mal à franchir le Mont-Blanc).

Quand la fièvre monte il ne sert à rien de casser le thermomètre. Mais tout de même, cette ruée sur le tag Covid-19 doit bien être le symptôme de quelque chose. Sur Télérama (qui consacre quand même toute une rubrique de son site au Covid-19) on trouve aussi que ça parle trop du virus dans le poste.
Et si je me taisais ?
Attendre tout simplement que baisse la coronacuriosité fiévreuse.
T’abandonner, cher visiteur d’un jour, à tes coron’interrogations.

Mais que cherchent vraiment ceux qui suivent le lien fb et viennent jeter un œil ici ?
Lorsque voici déjà 12 ans j’avais titré un billet À l’ombre des morilles en fleurs, les chasseurs d’ascomycètes sauvages s’y étaient rués en rang serrés, explosant déjà furieusement mes stats : je savais bien alors ce qu’ils cherchaient et n’ont pas trouvé (mes coins à morilles).
Mais aujourd’hui ? Aucune idée…

Tenez, si vous avez une minute à m’offrir, dites-moi en commentaire ce que vous espériez en coronacliquant jusqu’ici.
Et, en soutien au Maire (présent et prochaine) ainsi qu’à tous mes compagnons de village, ceci :

Mercredi 4 mars

Une information intéressante : le virus s’arrête au panneau de sortie du village !
Explications : quelques commerces sont situés avant l’entrée administrative de la commune, et donc sur le territoire de la commune d’à côté, et ce bien qu’étant dans la continuité directe des bâtiments qui bordent la route principale. Un simple panneau marque ainsi la frontière qui sépare deux mondes, le libre et le confiné.
Ces commerçants-là n’ont reçu aucune information concernant le Covid-19, ni en termes de précautions à prendre ni en termes d’aides disponibles. Pas concernés, c’est tout. Du bon côté du panneau, bien protégés du virus de coronàcôté.
Ce serait drôle s’ils n’avaient pas les mêmes problèmes que les confinés. Le fromager souffre ainsi d’une baisse d’activité de 50% et se demande s’il ne va pas tout simplement fermer le temps que les esprits se calment. Son épouse – ils vivent à Annecy – se fait régulièrement apostropher sur l’air de « t’es inconsciente de nous approcher alors que ton mec travaille là-bas ! » Là-bas étant cette antichambre de l’enfer, signalée par un panneau, et où finalement nous ne vivons pas si mal.
AtallahDans une tribune publiée en Suisse, Marc Atallah scrute la façon dont le virus contamine surtout nos imaginaires et « réactive nombre de nos angoisses, celles de nantis qui se trouvent soudainement à la merci d’une réalité biologique qu’ils ne peuvent pas maîtriser. » Selon lui, le coronavirus exhibe notre dépendance à l’égard d’un ailleurs que nous méprisons (la Chine et ses Chinois), montre à quel point l’autre est toujours un danger, vecteur de nos désastres, et éclaire notre égoïsme.
Je rejoins sa question finale : comment vivrons-nous une fois cet épisode derrière nous ? Jusqu’ici – qui se souvient du mouvement des indignés, de Nuit Debout, ou de la liesse à la chute du Mur ? – la réponse semble avoir toujours été : comme avant.
En attendant, je salue les propos du Maire qui, dans son dernier mail d’information, nous exhorte à la solidarité citoyenne pour que ceux qui disposent d’Internet (et donc reçoivent ses mails) relayent l’information auprès de ceux qui n’en disposent pas. Fracture sociale, fracture numérique, saurons-nous les plâtrer… pour continuer comme avant ?

Mardi 3 mars

Faut-il y voir une victoire locale face au virus ? Le Monde fait son article du jour sur l’épidémie en Morbihan ET ce matin le soleil brille sur le village : conjonction lumineuse, les nuages et le Covid-19 s’éloignent ! Ce serait trop simple…
Le message quotidien de la Mairie pointe pourtant la bascule entre le 22 février, décrivant notre « village paisible où il fait bon vivre et où nous aimons nous retrouver au marché dominical et chez les commerçants si sympathiques », et le 23 février au soir où « le patient zéro est déclaré positif au coronavirus. » Plus rien ne sera jamais comme avant ? Allons…

Le Dauphiné titre sur les rayons de supermarché dévalisés. La boulangerie du coin nous a gardé une baguette et quelques bugnes. Si des nécessiteux annéciens veulent prendre le risque, nous partageons.
Oui, je déclare la bugne produit de première nécessité, na ! La chute de la croissance mondiale ne passera pas par nous.
Le soleil ayant brillé toute la journée, il me faut admettre que tout va bien. Je formule toutefois un vœu pour le Maire et les autres malades : portez-vous bien et revenez vite partager la paisibilité de notre village où il fait toujours bon survivre.

Lundi 2 mars

Rues toujours vides : faut-il blâmer la pluie torrentielle ou le virus ?
La postière – pas de masque, mais des gants – se recule d’un mètre avec un air effrayé quand mon épouse lui avoue qu’elle est réflexologue (oui, elle touche des gens, avec le mains !)
La couturière nouvellement installée déplore la psychose qui tient ses clients loin de sa pratique.
La Mairie continue dans son mail quotidien de nous recommander de limiter les sorties et répond aux « nombreuses questions que ces recommandations suscitent », notamment celle-ci : « Les Balméens peuvent-ils aller travailler ? » Ma réponse personnelle est non, bien sûr, cessons le travail contraint, partageons ce que nous avons et regardons le monde changer. Mais, ne disposant pas de 49-3 légitime, je ne peux pas faire passer cette motion sans discussion. Ce que la Mairie a prévu, puisque, dans sa réponse à la question concernant les commerces on peut lire : « bien entendu tout ce qui peut s’apparenter à un rassemblement est proscrit (vous pouvez faire vos courses mais pas discuter en attroupement devant les magasins.» Heureusement qu’il nous est encore permis de discuter en attendant à l’intérieur du magasin.
J’ai l’air de faire de l’ironie facile, mais je suis sensible au casse-tête que ce doit être de rédiger ce genre de recommandation de façon claire et exhaustive sans prendre un air totalitaire.
La pluie s’en fout, elle rince, elle rince.

Dimanche 1er mars

Lu en une du Dauphiné Libéré : le Maire du village aurait contracté la maladie.
J’ai passé une bonne heure avec lui et quelques-uns de ses adjoints lundi dernier, pour une réunion concernant le club d’escalade. Poignée de main et discussion enjouée, nous étions assis à 30 cm l’un de l’autre. Je l’espère assez solide pour terrasser le virus.
La place du marché a repris son statut de parking zone bleue.
La boulangerie était vide, la vendeuse scrutant la rue principale (oui, notre village a un côté un peu américain avec son artère main street) où aucun client ne se profilait. J’ai pris un sachet de viennoiseries de la veille en ayant l’impression qu’il y en avait plus que d’habitude : hier déjà le chaland est resté cloitré. Il faut préciser qu’il pleuvait dru, alors que ce matin un soleil accueillant fait déjà monter le thermomètre au-delà des 10°.
Aucune caissière à la supérette Casino, juste une employée cachée derrière son masque pour vérifier le bon usage des caisses automatiques. Pas de clients non plus.
Me fais-je un film, ou les rues et routes sont-elles particulièrement vides ? J’aime bien : plus de place pour les chants d’oiseaux.